Le Compte d’Azrael (1932)
Limits and Renewals
Le poème clôt la nouvelle Unconvenented Mercies.
« Fable céleste » humoristique kafkaïenne : Satan crée en enfer un faux terminus de gare où les âmes attendent éternellement les personnes avec lesquelles elles s’étaient promis un amour éternel. Gabriel, Azraël et Satan, dans un cadre bureaucratico-céleste discutent du cas d’un couple et de leurs anges gardiens, âmes recyclées qui s’aimaient sur Terre. L’Archange des Anglais propose des améliorations révolutionnaires .
( Il semble que Kipling ait pu lire Kafka.. Hypothèse qui n’engage que moi, les spécialistes parlent plutôt d’une ville au pied de l’Himalaya, mais un des gardiens s'appelle Kalka'il...)
Azraël dans la tradition juive et musulmane est l’ange de la Mort.
Traduit dans La Pléiade IV
Le Compte d’Azraël
Là ! la Vache Sauvage du Désert, son veau s'est éloigné d'elle,
Perdu dans les dunes de sable tressées par le vent, assoiffé dans leur labyrinthe.
Pieds brûlants suivant ces empreintes de pied, la piste trois fois enchevêtrées.
Son âme est fermée à tout sauf à une seule chose — l’amour— quête qui la consume.
Sans crainte, elle mugit devant le campement, les feux des hommes ne l'effraient pas.
Elle rôde près des bêtes attachées, les juments retenues par des lances.
Elle écarte doucement de son mufle le voile de la tente des femmes.
Puis, retirée sous le clair de lune, une ombre au loin,
S’évanouit. Avant que les hommes ne crient «Saisissez là ! », l'obscurité la recouvre.
Elle, folle d'amour et désespérée, quand les chiens la menacent,
Seulement une corne balancée sur le côté, comme si une mouche la dérangeait,
Montre qu'elle a entendu, jusqu'à ce qu'une lance dans son cœur vibre.
— Voici, de cette carcasse informe— où s'enfuit son âme ?
Où est le rendez-vous qu'elle doit honorer? Qui est son entremetteur ? La mort !
Les hommes que je renvoie à la Miséricorde ne m'accueillent pas volontiers ;
Criant : « Pourquoi me cherches-Tu en premier ? Mes proches ne sont-ils pas encore en vie ? »
Reculant devant le tranchant de l'épée, clignant des yeux devant son éclat,
Enfonçant le menton dans le cou. A quoi cela leur sert-t-il ?
Pourtant, parmi dix mille hommes, peu m'accueillent autrement.
Mais, parmi mille femmes, une seule vient à moi en maîtresse.
Les bras ouverts, la poitrine ouverte, la bouche ouverte — son désir est brûlant.
Elle crie : « Ô Serviteur, libère-moi, je suis liée par les promesses de l'Amour !
Hâte-toi ! Il m’attend ! Je voudrais partir ! Attrape-moi vigoureusement ! »
Là ! ses yeux fixent au-delà de mes ailes, comme des choses qu'elle ne voit pas,
Là ! ses lèvres s'entrouvrent. Je ne suis pas celui qu'elle appelle.
Là ! Mon épée s'enfonce et revient. À aucun moment elle n'y prête attention,
Pas plus qu'à la poussière d'un voyage, ses vêtements en sont nettoyés.
Là ! Avant que l'afflux de sang ne cesse, son âme se précipite en avant.
Elle est partie pour son rendez-vous. Qui est son entremetteur ? La Mort !
Azrael’s Count.
Lo! the Wild Cow of the Desert, her yearling estrayed from her—
Lost in the wind plaited sand-dunes—athirst in the maze of them.
Hot foot she follows those foot-prints—the thrice tangled ways of them.
Her soul is shut save to one thing—the love-quest consuming her.
Fearless she lows past the camp, men’s fires affright her not.
Ranges she close to the tethered ones—the mares by the lances held.
Noses she softly apart the veil in the women’s tent.
Next—withdrawn under moonlight, a shadow afar off—
Fades. Ere men cry, ‘Hold her fast!’ darkness recovers her.
She the love-crazed and forlorn, when the dogs threaten her
Only a side-tossed horn, as though a fly troubled her,
Shows she hath heard, till a lance in the heart of her quivereth.
—Lo, from that carcass aheap—where speeds the soul of it?
Where is the tryst it must keep? Who is her pandar? Death!
Men I dismiss to the Mercy greet me not willingly;
Crying, ‘Why seekest Thou me first? Are not my kin unslain?’
Shrinking aside from the Sword-edge, blinking the glare of it,
Sinking the chin in the neck-bone. How shall that profit them?
Yet, among men a ten thousand, few meet me otherwise.
Yet, among women a thousand, one comes to me mistress-wise.
Arms open, breasts open, mouth open—hot is her need on her.
Crying, ‘Ho Servant, acquit me, the bound by Love’s promises!
Haste Thou! He waits! I would go! Handle me lustily!’
Lo! her eyes stare past my wings, as things unbeheld by her,
Lo! her lips summonsing part. I am not whom she calls.
Lo! My sword sinks and returns. At no time she heedeth it
More than the dust of a journey, her garments brushed clear of it.
Lo! Ere the blood-rush has ceased, forward her soul rushes.
She is away to her tryst. Who is her pandar? Death!
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