A.21. The Answer

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La Réponse (1892)

Barrack Rooms Ballads
Voix superposées : une Rose et Dieu, un fils et son père.

Fil(s) de la Vierge : reste du fil de transport des araignées, traduction de "gossamer"qui désigne le fil plutôt que la toile de l'araignée
Traduction en vers Jules Castier, Les sept mers, Louis Conard, 1920. Voir plus bas.

Une rose, en lambeaux sur le sentier du jardin,
Cria vers Dieu et murmura contre Sa colère,
Car un vent soudain, dans le silence du crépuscule,
Avait brisé sa tige, seule de son buisson.
Et Dieu, qui entend à la fois la poussière desséchée par le soleil et le soleil lui-même,
Eut pitié et murmura à cette infortunée :
« Ma sœur, tu dis que Nous avons mal agi,
Quelles voix as-tu entendues lorsque tes pétales sont tombées ? »
Et la rose répondit : « En cette heure funeste,
Une voix dit : « Père, pourquoi la fleur tombe-t-elle ?
Regarde, même les fils de la vierge sont immobiles. »
Et une voix répondit : « Fils, par la volonté d'Allah ! »

Puis, douce comme une brume de pluie sur le gazon,
Vint à la Rose la Réponse du Seigneur :
« Sœur, avant que Nous ne fendions les ténèbres en deux,
Avant même que les étoiles ne se voient clairement,
Le Temps, le Courant et l'Espace, nous nous sommes alliés pour cette tâche
Que tu devais tomber, et qu'un poserait la question. »
Sur quoi la fleur fanée, toute satisfaite,
Mourut comme meurent ceux dont les jours sont innocents ;
Tandis que celui qui avait demandé pourquoi la fleur était tombée
Rejoignit Dieu et sauva son âme de l'Enfer.

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Traduction de Jules Castier, Les sept mers, Louis Conard, 1920

La Réponse

Une Rose, en lambeaux au sable de l'allée
Se plaignit au Seigneur, murmurant, désolée,
Qu'un vent soudain, cinglant au soir en pâmoison,
Eut fracassé sa tige, — La seule, au buisson.
Et Dieu, qui sait entendre soleil et poussière,
Eût pitié, chuchotant à la Rose en l'ornière :
"Ma sœur, toi qui prétends que Notre acte fut bas,
Entendis-tu des voix, dis-Moi, quand tu tombas ?"
La Rose répondit : "Dans cette heure morose,
Une voix dit : "Pourquoi, Père, tombe la Rose ?
Car les fils de la Vierge, eux, rien le les troubla !"
Une autre dit :"Mon fils, c'est le vouloir d'Allah !"

Et douce comme à l'herbe une averse câline,
Vint alors à la Rose la Raison Divine :
"Ma sœur, avant d 'avoir fendu le Noir hargneux,
Avant que que les étoiles se vissent aux cieux,
Nous avions ordonné des Temps et des Espaces
Qu'un tel dût demander, et que toi tu tombasses
Avant la fleur fanée, en pleurs reconnaissants,
Mourut, comme l'on meurt plein de jours innocents ;
Et celui qui s'enquit, devant la fleur déserte,
Revint vers Dieu, sauvant son âme de la perte.


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The Answer

A rose, in tatters on the garden path,
Cried out to God and murmured ’gainst His Wrath,
Because a sudden wind at twilight’s hush
Had snapped her stem alone of all the bush.
And God, Who hears both sun-dried dust and sun,
Had pity, whispering to that luckless one,
“Sister, in that thou sayest We did not well—
What voices heardst thou when thy petals fell?”
And the Rose answered, “In that evil hour
A voice said, ‘Father, wherefore falls the flower?
For lo, the very gossamers are still.’
And a voice answered, ‘Son, by Allah’s will!’"

Then softly as a rain-mist on the sward,
Came to the Rose the Answer of the Lord:
“Sister, before We smote the dark in twain,
Ere yet the stars saw one another plain,
Time, Tide, and Space, We bound unto the task
That thou shouldst fall, and such an one should ask.”
Whereat the withered flower, all content,
Died as they die whose days are innocent;
While he who questioned why the flower fell
Caught hold of God and saved his soul from Hell.

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