Ballade de Jakko Hill(1886)
Départmental Ditties
Forme classique de ballade : trois strophes de huit vers et un envoi.
Jakko Hill : promenade à Simla où les Anglais viennent en villégiature pour fuir la chaleur de la plaine. A la date gravée sur l’arbre, Kipling n’a pas 20ans
Tiffin : déjeuner léger
A.D : Anno Domini
Rickshaw : Pousse-pousse
« Amour et Congés » : proposition de traduction de « Love and Leave », Jeu de mots possible sur « Aime et pars » et sur le lien plus probable entre amour et vacances (congé des militaires/fonctionnaires) à Simla.
Traduction : Traduit par A.Savine et M. Georges-Michel, Chansons de la chambrée, 1920. Voir plus loin.
Ballade de Jakko Hill
Un instant, faites patienter les chevaux,
Puisque le tiffin n'est servi qu'à trois heures,
En contrebas du sentier escarpé et étroit,
Que vous avez gravi il y a un an avec moi.
L'amour nous a surpris soudain,
Et a libéré – une heure oisive à tuer –
son arsenal aveugle et innocent.
Qui nous a frappés tous deux sur Jakko Hill.
Ah Ciel ! nous aurions attendu et attendu,
À travers le Temps et pour l'Éternité !
Ah Ciel ! nous pourrions vaincre le Destin,
Avec une constance plus que divine,
J'ai gravé la date sur un arbre,
Ici restent encore ces signes maladroits :
« 10-7-85, A.D. »
Humides de la brume de Jakko Hill.
Qu'est-il advenu des nobles et grandes résolutions,
Et de la fidélité jusqu'à la Mort !
Quel cheval attend à votre porte ?
Quel Rickshaw me roule dessus ?
Pas d'un Saint, je le jure ; et — laissez-moi voir
Ce soir, quels noms votre carnet de bal remplissent —
Nous nous séparons joyeusement,
Comme la brume dérive sur la colline de Jakko.
L’ENVOI.
Princesse, voici que notre ancien état
A complètement disparu ; et nous voyons
Que c’était l’Oisiveté que nous prîmes pour le Destin
Qui a lié des liens légers entre vous et moi.
Amen ! Ici se termine la comédie
Où elle a commencé en toute bonne volonté ;
Puisque l’Amour et les Congés s’enfuient ensemble
Comme passe la brume sur la colline de Jakko !
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Traduction de A.Savine et M. Georges-Michel, Chansons de la chambrée, L'édition française illustrée, 1920.
Ballade de la colline de Jakko
Faites attende les chevaux un instant,
Puisque le goûter ne sera servi que trois heures
Là-bas, ce sentier qui monte tout droit,
Vous l'avez gravi avec moi, il y a un an.
L'amour fondit soudain sur nous
Et lança, pour tuer une heure à loisir,
Sans y songer, sans y mettre de de la force, un arsenal de traits
Qui nous atteignirent tous deux sur la colline de Jakko
Ah ! Ciel ! Nous attendrions
Pendant le Temps, pendant l'Eternité !
Ah ! Ciel ! Nous serions capable de triompher du Destin
Avec une constance plus que divine !
J'ai gravé la date sur un arbre et
les voici encore ces chiffres maladroits
10-7-85. A.D.
Tout gonflés de brouillard de la colline de Jakko
Qu'est-il advenu de cette noble et grande résolution
Et de cette fidélité jusqu'à la mort ?
A qui est ce cheval qui attend à votre porte ?
A qui cette voiture dont les roues passent sur moi ?
Pas à un saint, je le jure, et... voyons...
Quels sont les noms qui remplissent votre carnet de bal.
Nous nous éloignons gïment l'un de l'autre,
De même que le brouillard quitte la colline de Jakko
L'Envoi.
Princesse, remarquez, notre ancien état
Est bel et bien disparu, et nous voyons
Que nous avons pris pour le Destin la frivolité
Qui nous a unis, vous et moi, de chaînes fragiles.
Amen ! Ici finit la comédie.
Où elle commença tout à fait de bonne foi,
Puisque l'amour et le congé s'enfuient ensemble,
Comme le brouillard est massé(sic) de la colline de Jakko
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A Ballade of Jakko Hill
One moment bid the horses wait,
Since tiffin is not laid till three,
Below the upward path and straight
You climbed a year ago with me.
Love came upon us suddenly
And loosed—an idle hour to kill—
A headless, armless armory
That smote us both on Jakko Hill.
Ah Heaven! we would wait and wait
Through Time and to Eternity!
Ah Heaven! we could conquer Fate
With more than Godlike constancy
I cut the date upon a tree—
Here stand the clumsy figures still:
“10-7-85, A.D.”
Damp with the mist of Jakko Hill.
What came of high resolve and great,
And until Death fidelity!
Whose horse is waiting at your gate?
Whose ’rickshaw-wheels ride over me?
No Saint’s, I swear; and—let me see
To-night what names your programme fill—
We drift asunder merrily,
As drifts the mist on Jakko Hill.
L’ENVOI.
Princess, behold our ancient state
Has clean departed; and we see
’Twas Idleness we took for Fate
That bound light bonds on you and me.
Amen! Here ends the comedy
Where it began in all good will;
Since Love and Leave together flee
As driven mist on Jakko Hill!
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