B.3. A Ballad of the Bitterness

By

                           Ballade de l’amertume (1883)

Poème de jeunesse dédicacé à sa mère "de substitution" Mrs Tavenor Perry.
Ecrit sur un carnet de bal inutilisé.
Ce poème n’a jamais été publié par Kipling.
CMG : Civil and Military Gazette, journal dans lequel travaille Kipling à son retour en Inde.
Waler : cheval australien importé aux Indes par les Anglais.
P&0 : Ligne maritime entre l’Inde et l’Angleterre.
Punkah : grand éventail en tissu, manipulé par un serviteur.

Ballade de l’amertume

Comment pourrait-il chanter la joie de Noël,
Ou les vacances de Noël,
Un jeune homme sous le soleil oriental,
A six mille lieues de là ?

Il n'a pas de vacances à prendre,
Pas de théâtres à voir ;
Ses chants de Noël sont faits par les presses
Que fait tourner la C.M.G.

Sous les palmiers, les palmiers poussiéreux,
Qui ombragent le toit de son bureau,
Il répond aux alertes du téléphone,
Et patauge dans les piles d’épreuves.

Le long du parcours, le parcours poussiéreux,
(Tout juste sorti de son bain matinal)
Il monte un waler horse qui rue
Ou chasse le jeune chacal.

De neuf à cinq, ses ciseaux brillent
Au milieu de cinquante-sept journaux—
Il essaie sous la pression du travail
D’éloigner les vapeurs de l’angoisse

Pourtant, malgré le vacarme et le bruit du bureau,
Les pensées intrusives viendront.
Et la vie, peut-être, offre des joies plus grandes
Que les ciseaux, les épreuves ou la colle.

Libéré des entraves des articles
Une pensée vagabonde va errer,
Là où le brouillard de Brompton s'accroche
Au-dessus du « Vingt-cinq, The Grove ».

Elle gâche le goût de ses cigares,
Avec une rapidité télégraphique
Alors que, dans sa tête fatiguée, surgit
Une douleur de— eh bien, de mal du pays !

Il se demande si tu comprendras
À quel point tu peux manquer à cet enfant ;
Et ce qu'il donnerait pour prendre ta main,
Et ce qu'il donnerait pour t’embrasser.

Il se demande si, dans les années à venir,
Il économisera assez pour partir,
Et prendre un billet en première classe pour rentrer chez lui,
A bord du P and O.

Il rêve de la moitié d’une centaine de choses
Au-dessus du tapis vert de la table ;
De mois brûlants, aux ailes de plomb,
Et de jours accablés de fièvre

Des nuits épuisantes où, pendant la moitié de l'année,
Le punkah grinçait et se balançait
Et, strident à son oreille sans sommeil,
L’infect moustique chantait.

Mais maintenant, l'année commence à mourir
Et Noël est à portée de main —
Quel cadeau digne de te saluer
Peut te parvenir de sa main ?

Il n'a pas de carte de Noël à envoyer —
Pas de billet doux parfumé,
Et donc il te transmet, très chère amie,
De son cœur l’amour le plus sincère

Et si, sur de vieux carnets de bal écrit,
Le discours semble pauvre et banal,
Crois-le, la moitié de sa vérité
Se cache plus profondément qu'il n'y paraît

Il demande : « Au milieu des plaisirs de Noël
Et de toute ta joie du Nouvel An,
Pense à lui sous le soleil de l'Orient
Ton toujours aimant
Garçon »



A Ballad of Bitterness

How shall he sing of Christmas fun,
Or Christmas holiday,
A youth beneath an Eastern sun,
Six thousand miles away?

No holidays are his to take,
No theatres to see;
His Christmas songs the Presses make
That drive the C.M.G.

Beneath the palms, the dusty palms,
That shade his office roof,
He takes the telephone's alarms,
And wades through piles of 'proof'.

Along the course, the dusty course,
(Fresh from his morning tub)
He steers the 'bucking waler' horse
Or hunts the jackal cub.

From nine to five his scissors gleam
Mid fifty-seven papers—
He tries by 'piling on the steam'
To drive away the 'vapours'

Yet—spite of office din and noise
Intrusive thoughts will come
And life, perhaps, has higher joys
Than scissors, proofs or gum.

Unhitched from paper leading strings
A vagrant thought will rove,To where the Brompton smoke fog clings
O'er 'Twenty-Five, The Grove'.

It spoils the taste of his cheroots,
With telegraphic quickness
As, through his weary head, there shoots
A pang of—well, homesickness!

He wonders if you'll understand
How much this child can miss you;
And what he'd give to take your hand,—
And what he'd give to kiss you.

He wonders if, in years to come,
He'll save enough to go,
And take a first class ticket home,
Aboard the P and O.

He dreams of half a hundred things
Above the table's baize;
Of redhot months, with leaden wings,
And fever stricken days.

Of weary nights when, half the year,
The punkah creaked and swung
And, shrilling in his sleepless ear,
The foul mosquito sung.

But now the year begins to die
And Christmas is at hand—
What gift to greet you worthily
Can reach you from his hand?

He has no Christmas card to send—
No scented billet doux,
And so he forwards, dearest friend,
His heart's best love to you.

And if, on old ball programmes writ,
The speech looks poor and mean,
Believe him—half the truth of it
Lies deeper than is seen

He asks—'In midst of Christmas fun
And all your new year joyThink of him 'neath an Eastern sun
Your always loving
Boy.'

Laisser un commentaire