Caïn et Abel (1939)
(Version Western 1934)
Definitive Verse
Publié en 39, trois ans après la mort de Kipling et sous-titré A Cattle Song, 1934.
L’histoire du premier meurtre biblique (Génèse,4) d’un frère éleveur par un frère cultivateur est réécrit à la lumière de ce que Kipling a pu voir lors de son séjour américain et des conflits, en particulier à propose de l’eau entre éleveurs (Horn : la corne) et Paysans (corn : le maïs, ici un faux-ami en francais),
Le poème utilise des américanismes en faisant parler un éleveur qui traduit le sentiment général sur "L'affaire Caïn"
Ce poème est un bon exemple de l’utilisation de majuscules expressives sur des noms communs par Kipling, j’ai donc choisi de les conserver.
Koop-la ! Co-hoe ! Cris pour faire avancez le bétail
Hickory : Bois dur, nom américain.
Caïn et Abel
(Version western, 1934)
Caïn et Abel étaient nés frères.
(Koop-la ! Avancez, les vaches !)
L'un élevait du bétail et l’autre élevait du maïs.
(Koop-la ! Avancez ! Co-hoe !)
Et Caïn cultivait près de la rivière,
Il ne se souciait donc pas de la sécheresse.
Car il endiguait, et canalisait et creusait des fossés, et il menait
(Et le Maïs se moque de la Corne) —
La moitié de l'Euphrate hors de son lit
Pour arroser son foutu Maïs !
Mais Abel gardait son troupeau dans les plaines,
Où vous devez compter sur les réservoirs et les pluies.
Il arriva qu'après trois ans de sécheresse,
Les puits, les sources et les réservoirs se tarirent.
Les Taureaux vinrent à la nouvelle maison de Caïn
(Ils voulaient tellement de l'eau !—)
Avec le Soleil rouge brûlant entre leurs cornes,
En disant : « Donne-nous de l'eau pour nos pauvres vaches ! »
Mais Caïn leur répondit—« Non ! »
Les Vaches vinrent à la grande maison de Caïn,
Avec la lune blanche et froide entre leurs cornes,
En disant : « Donne de l'eau à nous autres pauv’ vaches ! »
Mais Caïn leur répondit—« Non ! »
Les p’tits Veaux vinrent à la belle maison de Caïn,
Avec l'étoile du soir entre leurs cornes,
En disant : « Donne-nous de l'eau et on s’ra des vaches ! »
Mais Caïn leur répondit—« Non ! »
Les Taureaux les ramenèrent encore,
Et Abel vint et dit à Caïn :
« Oh, vends-moi de l'eau, mon cher frère,
Ou il n'y aura pas de viande cette année. »
Et Caïn répondit —« Non ! »
« Alors ouvre tes vannes, mon vrai frère,
Et laisse passer un peu d'eau. »
Mais Caïn répondit—« Non ! »
« Mes barrages sont solides et mes fossés sont étanches,
Et pas une goutte ne passe ou ne s'échappe
Jusqu’à ce qu’elle fasse son devoir pour le Maïs.
« Je ne vendrai pas, je n’ouvrirai pas,
Et si tu les perces, j’aurais la Loi,
Aussi sûr que tu es né ! »
Alors Abel prit son meilleur aiguillon à bœufs,
Et troua une digue sur la route d'Eden.
Il l'ouvrit avec le pied et la main,
Et laissa l'Euphrate se déverser sur la terre.
Il déversa l'Euphrate dans la plaine,
Afin que tout son bétail puisse à nouveau boire.
Alors Caïn vit ce qu'Abel avait fait—
Mais à cette époque, il n'y avait pas de Fusil !
Il se fabriqua donc une massue avec une branche de hickory,
Et arrêta Abel et lui dit :
« Je n'ai pas vendu et je n'ai pas ouvert,
Et maintenant que tu l’as percé, j’aurai la Loi.
« Tu chevauches avec ton chapeau et tes éperons,
Tes sabots de l’enfer sur mes concombres !
« Tu pries le Seigneur de t'envoyer la chance
Et tu lâches tes bœufs dans mon potager :
« Et maintenant, tu es ruiné, comme tu le mérites,
Tu peux continuer à prier, mais pas moi ! »
Alors Abel comprit que c'était une question de vie ou de mort ;
Mais, à cette époque, il n'y avait pas de Couteau :
Il se dressa donc avec son grand aiguillon à bœufs,
Mais Caïn frappa le premier et le tua !
Les taureaux de troupeau s'enfuirent lorsqu'ils sentirent l'odeur du sang,
Et ils ont donné des coups de cornes et de sabots dans la Boue Rouge.
Les Veaux ont mugit, et les Bœufs se sont agités,
Car c'était le Premier Homme Tué ;
Et tout le Troupeau s'est enfui vers le pays de Nod,
Et Caïn a été laissé pour être jugé par Dieu !
Mais, quand on voit tout ce qu'il avait dû endurer,
Je n'ai jamais pu trouver ce Jugement juste !
Cain and Abel
‘Western Version, 1934’
1
Cain and Abel were brothers born.
(Koop-la! Come along, cows!)
One raised cattle and one raised corn.
(Koop-la! Come along! Co-hoe!)
And Cain he farmed by the river-side,
So he did not care how much it dried.
For he banked, and he sluiced, and he ditched and he led
(And the Corn don’t care for the Horn)—
A-half Euphrates out of her bed
To water his dam’ Corn!
But Abel herded out on the plains
Where you have to go by the dams and rains.
5
It happened, after a three-year drought,
The wells, and the springs, and the dams gave out.
The Herd-bulls came to Cain’s new house
(They wanted water so!—)
With the hot red Sun between their brows,
Sayin’ “Give us water for our pore cows!”
But Cain he told ’em—“No!”
The Cows they came to Cain’s big house
With the cold white Moon between their brows,
Sayin’ “Give some water to us pore cows!”
But Cain he told ’em—“No?”
The li’l Calves came to Cain’s fine house
With the Evenin’ Star between their brows,
Sayin’ “Give us water an’ we’ll be cows!”
But Cain he told ’em—“No!”
The Herd-bulls led ’em back again,
An’ Abel went an’ said to Cain:—
“Oh, sell me water, my brother dear,
Or there will be no beef this year.”
And Cain he answered—“No!”
10
“Then draw your hatches, my brother true,
An’ let a little water through.”
But Cain he answered:—“No!
“My dams are tight an’ my ditches are sound,
An’ not a drop goes through or round
Till she’s done her duty by the Corn.
“I will not sell, an’ I will not draw,
An’ if you breach, I’ll have the Law,
As sure as you are born!”
Then Abel took his best bull-goad,
An’ holed a dyke on the Eden road.
He opened her up with foot an’ hand,
An’ let Euphrates loose on the land.
15
He spilled Euphrates out on the plain,
So’s all his cattle could drink again.
Then Cain he saw what Abel done—
But, in those days, there was no Gun!
So he made him a club of a hickory-limb,
An’ halted Abel an’ said to him:—
“I did not sell an’ I did not draw,
An’ now you’ve breached I’ll have the Law.
“You ride abroad in your hat and spurs,
Hell-hoofin’ over my cucumbers!
20
“You pray to the Lord to send you luck
An’ you loose your steers in my garden-truck:
“An’ now you’re bust, as you ought to be,
You can keep on prayin’ but not to me!”
Then Abel saw it meant the life;
But, in those days, there was no Knife:
So he up with his big bull-goad instead,
But—Cain hit first and dropped him dead!
The Herd-bulls ran when they smelt the blood,
An’ horned an’ pawed in that Red Mud.
The Calves they bawled, and the Steers they milled,
Because it was the First Man Killed;—
An’ the whole Herd broke for the Land of Nod,
An’ Cain was left to be judged by God!
25
But, seein’ all he had had to bear,
I never could call the Judgment fair!
Laisser un commentaire